Son nom sonne comme une invitation au voyage ; il
évoque un conte maritime ou un récit d'aventure.
Sa
langue portugaise laisse notre imagination le situer quelque part le
long des côtes brésiliennes.
Un jour, le sinistre cortège des négriers ne
s'est plus
arrêté aux îles du Cap-Vert. Pour des
milliers
d'esclaves en transit vers le nouveau monde, ce qui était
une
escale est devenu la fin du voyage. Délaissée par
le
Portugal, cette population née du commerce des hommes a
dû
apprendre à vivre sur ces îles qui ont la
beauté
des terres stériles.
No man's land de l'histoire, elles deviennent
réalité
lorsque nous atterrissons sur l'aéroport international de
l'île de Sal. L'archipel du Cap-Vert est-il devenu si peu
important pour qu'on l'ait laissé dériver dans
les
abîmes de l'oubli ? Notre passé de
négrier s'est-il
échoué sur ces rivages pour que l'on fasse de ces
terres
océanes l'exil de notre mauvaise conscience ?
Si la voix langoureuse de Cesaria Evora ne nous avait pas sortie de
cette amnésie collective, nous serions vraisemblablement
toujours en train de jouer à colin-maillard avec notre
mémoire.
© Jean-Luc Barbier